Pourquoi 2025 change la donne pour la retraite des travailleurs indépendants ?
2025 marque un tournant parce que deux évolutions se cumulent :
- Une nouvelle assiette unique de cotisations sociales pour les indépendants, calculée sur le revenu professionnel diminué d’un abattement forfaitaire de 26 % (2).
- Des enveloppes fiscales retraite très élevées grâce au PER et aux contrats Madelin, indexées sur le PASS, lui-même relevé à 47 100 € au 1er janvier 2025.
Conséquences directes pour un TNS (profession libérale, artisan, commerçant, gérant majoritaire, consultant…) :
- Les cotisations retraite de base augmentent et génèrent davantage de droits.
- L’assiette sociale est plus lisible et plus proche de la logique des salariés.
- Les marges de manœuvre fiscales via l’épargne retraite individuelle restent très larges, avec des plafonds pouvant dépasser 80 000 € (3) de déduction par an pour les hauts revenus.
Comment est calculée la nouvelle assiette de cotisations sociales des indépendants en 2025 ?
Depuis le 1er janvier 2025, l’ensemble des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants (cotisations vieillesse, allocations familiales, CSG-CRDS, etc.) repose sur une assiette unique :
- Revenu professionnel brut (chiffre d’affaires – charges professionnelles, hors cotisations sociales).
- Application d’un abattement forfaitaire de 26 % pour déterminer l’assiette sociale.
Cette assiette est encadrée par :
- Un plancher fixé à 1,76 % du PASS, soit 828,96 € en 2025.(4)
- Un plafond égal à 130 % du PASS, soit 61 230 € en 2025.
Objectifs de la réforme :
- Simplifier le calcul des cotisations (une seule assiette au lieu de barèmes multiples).
- Accroître la part des cotisations génératrices de droits retraite, en réduisant la part des contributions type CSG-CRDS.
Pour les TNS, cela signifie que la base sur laquelle reposent leurs droits à la retraite est plus lisible, tout en restant compatible avec des dispositifs d’épargne retraite facultative très avantageux fiscalement.
En quoi le PER est-il devenu l’outil central d’optimisation fiscale retraite pour un TNS ?
Le Plan d’épargne retraite (PER) est aujourd’hui le vecteur principal d’optimisation fiscale pour un indépendant, parce que :
- Les versements volontaires sont déductibles de votre revenu imposable dans la limite d’un plafond très élevé.
- Le PER est plus souple qu’un ancien contrat Madelin retraite (sortie possible en capital, options de sortie fractionnée, transfert entre PER).
- Le cadre légal permet un cumul avec d’autres dispositifs (Madelin, régimes obligatoires) dans la même enveloppe globale de déduction d’épargne retraite.
Quel est le plafond de déduction PER pour un indépendant en 2025 et comment le calculer ?
Pour un travailleur non salarié (TNS), deux modalités de déduction des versements sur un PER existent :
- déduction du revenu professionnel BIC/BNC (article 154 bis du CGI),
- ou déduction du revenu global (article 163 quatervicies du CGI).
Le calcul ci-dessous correspond au plafond de déduction applicable dans le cadre de l’article 154 bis du CGI.
- 10 % du bénéfice imposable de l’année en cours , dans la limite de 8 PASS (de l’année en cours) soit pour 2025 (soit 8 × 47 100 € = 376 800 €).
- + 15 % de la fraction du bénéfice comprise entre 1 et 8 PASS de l’année en cours , le tout plafonné à 87 135 € pour 2025 .
- Plancher : 10 % du PASS (de l’année en cours) soit pour 2025 soit 4 710 € minimum, même pour un bénéfice faible.
Exemple de calcul pour un bénéfice imposable de 70 000 €
- 10 % de 70 000 € = 7 000 €
- Fraction entre 1 et 8 PASS : 70 000 – 47 100 = 22 900 €
- 15 % de 22 900 € = 3 435 €
- Plafond PER 2025 = 7 000 + 3 435 = 10 435 €
Si votre Taux Marginal d’Imposition (TMI) est de 41 %, un versement de 10 435 € permet une économie d’impôt de 4 278 € (10.435 x0,41) tout en alimentant votre épargne retraite long terme.
Comparaison rapide selon le TMI
| Bénéfice imposable |
Plafond PER 2025 (approx.) |
TMI 11 % – économie d’impôt |
TMI 30 % – économie d’impôt |
TMI 41 % – économie d’impôt |
| 30 000 € |
4 710 € (plancher) |
≈ 518 € |
≈ 1 413 € |
≈ 1 931 € |
| 50 000 € |
≈ 7 000 € |
≈ 770 € |
≈ 2 100 € |
≈ 2 870 € |
| 70 000 € |
10 435 € |
≈ 1 148 € |
≈ 3 131 € |
≈ 4 278 € |
| 100 000 € |
> 15 000 € |
≈ 1 650 € |
≈ 4 500 € |
≈ 6 150 € |
Les ordres de grandeur suffisent pour voir que plus le TMI est élevé, plus le PER devient puissant comme levier de réduction d’impôt.
Comment utiliser le report de plafonds PER et la mutualisation entre conjoints pour maximiser la déduction (uniquement si option pour l'article 163 quatervicies du CGI) ?
Comment fonctionne le report de plafonds sur trois ans ?
Les TNS peuvent reporter leurs plafonds PER non utilisés sur les trois années précédentes uniquement s'ils ont choisi la déduction sur le revenu global (article 163 quatervicies du CGI).
- De lisser les versements,
- De concentrer un effort d’épargne sur une année de forte rentabilité,
- D’optimiser la déduction sur une année où le TMI est particulièrement élevé.
Exemple simple :
- Plafond 2022 non utilisé : 3 000 €
- Plafond 2023 non utilisé : 4 000 €
- Plafond 2024 non utilisé : 4 000 €
- Plafond 2025 de base : 7 000 €
En 2025, vous pouvez verser jusqu’à 18 000 € sur votre PER avec déduction intégrale (sous réserve de ne pas avoir déjà consommé ces plafonds via d’autres PER).
Comment la mutualisation entre conjoints peut-elle amplifier l’avantage ?
Les couples mariés ou pacsés soumis à une imposition commune peuvent mutualiser leurs plafonds PER uniquement dans le cadre de l'article 163 quatervicies du CGI.
Mécanisme :
Lorsque l’un des conjoints est travailleur non salarié (TNS), la mutualisation n’est possible que si ce dernier a préalablement opté pour la déduction de ses versements au titre de l’article 163 quatervicies du CGI. Ce choix conditionne la possibilité d’utiliser les plafonds du couple de manière conjointe et peut ainsi renforcer l’avantage fiscal global.
- L’administration impute d’abord les versements sur les plafonds individuels de l’année N.
- Puis utilise les reliquats des trois années précédentes.
- Ensuite seulement, les plafonds de l’autre conjoint sont mobilisés.
Cas exemple :
Pour que la mutualisation soit possible, les deux plafonds utilisés doivent relever de l’article 163 quatervicies du CGI, c’est-à-dire les plafonds PER « fiscaux » classiques.
Si le plafond de l’indépendant provient du calcul spécifique TNS de l’article 154 bis du CGI, alors aucune mutualisation avec le conjoint salarié n’est possible.
- Conjoint A : TNS ayant opté pour la déduction au titre de l’article 163 quatervicies du CGI, disposant d’un plafond PER « fiscal » non utilisé de 32 908 € (plafond possible selon la limite de 10 % du PASS ou 10 % du revenu professionnel retenu dans le cadre du 163 quatervicies).
- Conjoint B : salarié, disposant d’un plafond PER non utilisé de 37 094 €.
Résultat : Le couple peut alors mutualiser leurs plafonds PER relevant du 163 quatervicies, soit :
32 908 € + 37 094 € = 70 002 € de versements déductibles sur une même année.
- D’une cession de patientèle ou de clientèle libérale,
- D’un exercice exceptionnellement rentable,
- D’un rattrapage d’épargne retraite tardive.
Faut-il encore s’intéresser aux contrats Madelin retraite face au PER ?
Les contrats de retraite Madelin restent juridiquement en vigueur et peuvent continuer à être alimentés par des versements, mais le PER a pris le leadership pour plusieurs raisons :
- Souplesse de sortie :
- Madelin retraite = sortie théoriquement en rente (capital plus encadré).
- PER = sortie possible en capital, en rente, ou mixte, avec options d’arbitrage.
- Portabilité : les anciens Madelin peuvent être transférés vers un PER.
- Fiscalité à la sortie : le PER offre la possibilité de choisir entre des versements déductibles ou non déductibles, afin d’optimiser l’imposition appliquée au capital au moment de la retraite.
Plafonds de déduction retraite Madelin en 2025
Les règles de plafond Madelin retraite reprennent exactement la même formule que pour le PER TNS :
- Le plus élevé entre :
- 10 % du bénéfice imposable de l’année en cours (+ 15 % sur la fraction comprise entre 1 et 8 PASS de l’année en cours), ou
- 10 % du PASS de l’année en cours (4 710 € en 2025).
- Plafond global : 87 135 € en 2025.
PER TNS vs Madelin retraite : comparatif synthétique
| Critère |
Plafond PER 2025 (approx.) |
Contrat retraite Madelin |
| Plafond de déduction |
Identique (jusqu’à 87 135 €) |
Identique |
| Souplesse de sortie |
Capital / rente / mixte; |
Principalement rente |
| Portabilité |
Transferts faciles entre PER |
Transférable vers un PER |
| Fiscalité à l’entrée |
Déduction facultative (choix déduire/non) |
Cotisations déductibles par principe (article 154 bis du CGI); |
| Usage patrimonial |
Très modulable (stratégies familiales) |
Plus rigide |
En pratique, pour de nouveaux versements, le PER doit devenir le support prioritaire, les contrats Madelin retraite restant surtout un stock à optimiser ou à transférer.
Quelles sont les règles de déduction Madelin pour la santé et la prévoyance en 2025 ?
Pour les contrats de santé et de prévoyance Madelin, les cotisations restent déductibles du revenu imposable, mais avec une enveloppe spécifique, indépendante de l’épargne retraite.
Formule 2025 pour santé + prévoyance Madelin :
- 3,75 % du revenu professionnel
- auquel s’ajoute 7 % du PASS de l’année en cours (soit 3 297 € en 2025)
- Le tout dans la limite de 3 % de 8 PASS de l’année en cours, soit 11 304 € en 2025.
Exemples de plafonds santé/prévoyance Madelin 2025
| Revenu professionnel |
3,75 % du revenu |
7 % du PASS |
Plafond théorique |
Plafond max légal |
| 30 000 € |
1 125 € |
3 297 € |
4 422 € |
11 304 € |
| 50 000 € |
1 875 € |
3 297 € |
5 172 € |
11 304 € |
| 90 000 € |
3 375 € |
3 297 € |
6 672 € |
11 304 € |
Cette enveloppe santé/prévoyance ne vient pas réduire votre plafond retraite PER/Madelin : il s’agit d’un plafond de déduction séparé, très utile pour calibrer vos garanties sans dégrader votre fiscalité globale.
Quel est l’intérêt fiscal du statut de conjoint collaborateur pour la retraite du foyer ?
Le conjoint collaborateur (époux·se ou partenaire de PACS qui travaille régulièrement dans l’entreprise sans être salarié ni associé) peut cotiser pour sa propre retraite, avec des cotisations :
- Soit sur une assiette forfaitaire :
- 1/3 du PASS (15 700 € en 2025), permettant de valider 4 trimestres par an.
- Soit avec partage de revenu :
- Cotisation sur 1/3 ou 50 % du revenu du chef d’entreprise, avec réduction corrélative de l’assiette de ce dernier.
- Soit sans partage de revenu :
- Le conjoint cotise sur 1/3 ou 50 % du revenu, sans diminuer l’assiette du chef d’entreprise (coût global plus élevé, mais droits renforcés pour le conjoint).
En complément, le conjoint collaborateur peut :
- Ouvrir son propre PER et utiliser l’enveloppe de déduction du foyer (mutualisation des plafonds).
- Bénéficier indirectement des stratégies de report de plafonds sur 3 ans.
Pour un couple où un seul membre est TNS, structurer l’activité en intégrant un conjoint collaborateur peut :
- Améliorer la protection sociale du foyer,
- Optimiser la répartition des droits retraite,
- Élargir les possibilités de déduction via PER et Madelin.
Cumul emploi-retraite des indépendants : quelles nouvelles opportunités en 2025 ?
Depuis 2025, les règles du cumul emploi-retraite ont évolué pour les indépendants :
- En cas de cumul intégral (toutes les pensions liquidées, retraite à taux plein), les indépendants relevant du régime complémentaire des indépendants acquièrent désormais de nouveaux points de retraite complémentaire, donnant droit à une seconde pension (base + complémentaire) sous conditions.
- Les auto-entrepreneurs retraités peuvent également acquérir des points de retraite complémentaire, dans la limite d’un plafond annuel de droits.
En pratique, cela signifie qu’
un indépendant qui :
- A atteint l’âge légal de départ,
- Bénéficie d’une retraite à taux plein,
- Et a liquidé toutes ses pensions obligatoires,
peut reprendre ou poursuivre une activité indépendante, cumuler revenus professionnels et pensions sans plafond, tout en générant de nouveaux droits retraite jusqu’à la liquidation d’une seconde pension.
Pour un conseil patrimonial, ce point est stratégique : la phase de cumul emploi-retraite devient une phase d’optimisation complémentaire, et non plus seulement une période de revenus additionnels.
Quelles stratégies concrètes mettre en place pour optimiser fiscalité et retraite quand vous êtes indépendant ?
- 1. Prioriser les années à forte rentabilité
Les années de bénéfice élevé et de TMI élevé sont les meilleures pour :
- Utiliser les plafonds PER TNS (jusqu’à 87 135 €).
- Consommer les plafonds reportés des trois années précédentes (uniquement si le TNS a opté pour des versements sur son PER, permettant la déduction au titre de l’article 163 quatervicies du CGI)
- Intégrer les plafonds non utilisés du conjoint si le couple est imposé conjointement.
- 2. Élaborer un plan de versement progressif
Plutôt que de tout verser en fin de carrière :
- Mettre en place des versements réguliers (mensuels ou trimestriels) sur le PER..
- Ajouter des versements exceptionnels en fin d’année lorsque le bénéfice définitif se précise.
- 3. Arbitrer, lors de chaque versement, entre effectuer un versement déductible ou non déductible.
Le PER permet :
- Des versements déductibles, qui maximisent la réduction d’impôt aujourd’hui, au prix d’une fiscalité plus forte à la sortie.
- Des versements non déductibles, dont le capital sera exonéré d’impôt sur le revenu à la sortie (seuls les gains restent soumis aux prélèvements sociaux).
Stratégie classique :
- Utiliser les versements déductibles tant que le TMI est élevé.
- Introduire des versements non déductibles lorsque le TMI baisse ou lorsque la question de la fiscalité de sortie devient centrale.
- 4. Calibrer correctement santé et prévoyance Madelin
L’enveloppe santé/prévoyance Madelin (jusqu’à 11 304 €) peut être utilisée pour :
- Financer des garanties de haut niveau tout en réduisant le coût net après impôt.
- Libérer du budget sur le compte de résultat de l’entreprise pour augmenter les versements retraite (PER/Madelin).
Quels sont les principaux points de vigilance avant de valider vos choix d’épargne retraite ?
- Pour les TNS, les plafonds Madelin comme PER se calculent sur les revenus de l’année en cours (année N), et non N–1. Il faut donc estimer votre bénéfice 2025 avec prudence.
- 2. Plafond global épargne retraite
- Le plafond de déduction est commun à tous les dispositifs retraite (PER, Madelin, article 83…), sous réserve des règles particulières applicables à chaque statut.
- 3. Interaction avec les autres niches fiscales
- Le plafonnement global des niches fiscales à 10 000 € par an ne s’applique pas à la déduction épargne retraite. Vous pouvez donc cumuler avantage retraite et autres réductions/crédits d’impôt (immobilier, emploi à domicile, dons…).
- 4.Coordination avec le conjoint
- Une mauvaise coordination des versements peut conduire à gaspiller du plafond chez l’un et à saturer celui de l’autre. La mutualisation doit être pensée à l’échelle du foyer.
- Le PER reste une enveloppe de long terme, avec des conditions de sortie encadrées (retraite, quelques cas de déblocage anticipé). Le niveau de versement doit rester compatible avec la trésorerie et les projets à moyen terme.
(1)https://www.juritravail.com/Actualite/plafond-securite-sociale/Id/376874
(2)https://boss.gouv.fr/portail/accueil/actualites-boss/2024/novembre/le-plafond-de-la-securite-social.html
(3)Article 154 bis du CGI : déduction des cotisations retraite du revenu catégoriel (BIC, BNC, art. 62). Plafond majoré, mais sans report sur trois ans ni mutualisation avec le conjoint.
(4)Article 163 quatervicies du CGI : déduction des versements sur le revenu global. Permet le report des plafonds PER non utilisés sur trois ans et la mutualisation entre conjoints.